Les anges de nos campagnes

Ange céroféraire (tenant un cierge ou un chandelier) précédant saint Jean-Baptiste.
Jenzat – XVe siècle

Les anges sont partout chez eux dans nos églises où la peinture leur accorde volontiers une place choisie. Ange-sourire pour chaque jour, ange-grâce pour chaque situation … ne dit-on pas communément quand un silence se fait dans une conversation : « un ange passe ».
Voici l’évocation de leur passage en traits de couleurs au ciel de nos églises … bruissements d’ailes … froissements d’étoffes … chuintements légers … présence.

Témoins attentifs, toujours attentionnés, déférents messagers, adorateurs merveilleux ployant humblement le genou, traits d’union ailés entre ciel et terre, tels ils apparaissent, souriants ou graves, miroirs éclatants d’une tendresse venue jusqu’à nous.
Ils désignent, ils manifestent ce que nous ne voyons pas et que leurs yeux contemplent sans fin ni lassitude, dans un présent infini, discrets, émerveillés et purs.

Les anges tiennent une place considérable dans la vie religieuse médiévale. Ils sont des serviteurs de Dieu offrant leur protection à l’humanité. Créatures célestes, ils interviennent dans le monde visible.
Grégoire le Grand va s’inspirer de la hiérarchisation de Denys l’Aérophage (début du VIe siècle) pour distinguer lui-même les anges adorateurs, les anges combattants et les anges messagers. Cette typologie dominera jusqu’au XIIe siècle.

Les anges adorateurs foisonnent, certains munis d’un chandelier propagent la lueur divine comme à Saulcet

Deux anges tenant un chandelier encadrent saint Nicolas.
Saulcet – XIVe siècle

Ils peuvent aussi participer à un épisode de la vie du Christ, le Baptême par exemple. Ainsi à Taxat, un ange présente au Christ sa tunique.

Le Baptême du Christ .
Taxat-Senat – XIVe siècle

Les anges combattants constituent la milice du Christ, celle qui l’escorte lors de son retour à la fin des temps. L’archange Michel chef de la milice céleste et défenseur de l’Eglise est celui qui terrasse de sa lance ou de son épée le dragon ou Lucifer, l’ange déchu. Michel est en outre psychopompe, c’est-à-dire qu’il conduit les morts et qu’il pèse les âmes le jour du Jugement Dernier.
Autre ange combattant, saint Georges souvent représenté sur un cheval blanc. Le combat de Georges contre le dragon est un sujet très souvent représenté à partir de XIIIe siècle. Il symbolise la victoire de la Foi sur le Mal.

Saint Michel à la balance et terrassant le dragon.
Saulcet – Début du XVe siècle.

Révélant à Marie sa maternité divine prochaine, l’archange Gabriel est le premier des anges annonciateurs.
Anges de la parole, porte-voix divins, ceux-là portent la bonne nouvelle aux bergers, avertissent Joseph de la nécessité de fuir en Egypte, préviennent les Saintes Femmes de la Résurrection…

Gabriel, Ange de l’Annonciation.
Tribune d’Ebreuil
Début du XIIIe siècle

A cette liste, il est bon d’ajouter les anges musiciens, associés à la musique des sphères et du cosmos, les voici qui chantent, psalmodient, jouent d’instruments, harpes et luths … ange de Fleuriel qui accueillent le défunt au ciel! Dans leur jeu, toute la douceur, la suavité exquise du Paradis, ces notes que nous n’entendons pas, et que leurs gestes esquissent …

Les Anges musiciens.
Fleuriel, transept sud.
Moitié du XVe siècle

A partir du XIIIe siècle, quelques mutations s’opèrent, les anges se multiplient. Les anges adorateurs ne se comptent plus, notamment les anges thuriféraires et les anges musiciens. Ils ne louent plus seulement le Christ, mais aussi la Vierge. Cette tendance ne fait que s’accentuer au XIVe et XVe siècles.

Leur prolifération profite des représentations sans cesse plus nombreuses du Jugement Dernier. Il y a
– ceux qui entourent le Christ-Juge et portent les instruments de la Passion,
– ceux qui sonnent de leur trompe pour convoquer les vivants et les morts devant le Christ-Juge et, surtout,
– ceux qui conduisent les élus au Paradis comme dans l’oratoire du château de l’Anglard.

Ces derniers sont l’illustration de cette idée majeure, apparue au XIIe siècle et ensuite sans cesse affermie jusqu’au XVe siècle, selon laquelle chaque individu est protégé par un ange gardien chargé de le guider vers le salut.

Peut-être cela vient il de la conséquence de la peur de la mort provoquée par les malheurs des temps ou encore la peur inspirée à chacun par la perspective de sa comparution devant le Tout-Puissant pour rendre compte de ses actions?
En cette fin du Moyen-Age, l’ange est davantage perçu et montré comme un protecteur. Il n’est plus vraiment cette créature céleste qu’il convenait d’imiter.

Un ange accueille les élus. Mazerier
Oratoire du château de l’Anglard

5 réflexions sur “Les anges de nos campagnes”

  1. Michel MOULIN

    Merci pour ce bel article.
    On pourrait aussi parler des anges musiciens de Chateloy, de saint Michel de Verneuil, et des anges de Vitray.
    A quand la suite ?

    1. Le but de ces articles n’est pas d’être exhaustif mais de sensibiliser à la découverte des richesses picturales qu’abritent toutes ces églises rurales.

      1. Je comprends bien cette impossibilité mais il faut aussi tenir compte de ces églises périphériques trop souvent oubliées. À force d’entendre tjs parler de Jenzat, Saulcet, Taxat, … nos adhérents ne vont pas apprécier (remarque de St Germain des Fossés au cours de l’AG).
        A quand le prochain article?

  2. Merci pour ces remarques. Le but des ces articles n’est pas d’être exhaustif mais de sensibiliser aux attraits des peintures murales présentes dans les église de la Route afin de sensibiliser les personnes à se rendre dans ces édifices.

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